Page:Chuquet - J.-J. Rousseau, 1922.djvu/94

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Jean-Jacques ne se borne pas à demander que l’art soit plus libre, qu’il ait plus d’action et de vérité, qu’il étende le champ de son observation, qu’il daigne s’occuper du bourgeois et de l’artisan. Il cherche la cause de cette décadence du théâtre et la trouve dans l’ascendant des femmes, dans la gynécocratie : les femmes régnent partout ; sur la scène, elles apprennent tout aux hommes et les écrasent de leurs propres talents ; dans le monde, celle qu’on estime le plus est celle qui a le verbe le plus haut, qui donne le ton, prononce, tranche sans rien savoir. Et ici reparaît le Rousseau qui fait avec une rare noblesse la leçon à son siècle. Pas de bonnes mœurs pour les femmes hors d’une existence retirée et recueillie ; elles doivent vaquer aux soins du ménage, et il n’y a point de spectacle plus touchant que celui d’une mère entourée de ses enfants, réglant les travaux de ses domestiques, gouvernant avec sagesse la maison qui sans elle serait un corps sans âme. Voyez les Anglaises : elles goûtent les vrais plaisirs, elles errent aussi volontiers dans leurs parcs qu’elles se promènent à Vauxhall, elles songent moins à paraître heureuses qu’à l’être, elles honorent la loi conjugale et ne s’honorent pas de la violer, leur amour décide de leur vie. A l’exemple des Anglaises, la femme restera digne et modeste : « Rechercher les regards des hommes, c’est déjà s’en laisser corrompre ». Les philosophes vont crier que la pudeur est un préjugé, que les désirs des deux sexes sont égaux, que les démonstrations ne