ni à l’amitié, pensa que, dans cette circonstance, l’autorité des avis d’un père, le vœu témoigné par ses prières, devaient céder à la fureur qui le possédait. Le matin des calendes de décembre, comme il l’avait déclaré, il fait appeler Sthénius. Si votre père, Verrès, à la prière d’un ami, par bonté ou par complaisance, vous eût demandé cette grâce, eh bien ! la recommandation paternelle aurait dû être sur vous d’un grand poids ; et quand il vous sollicitait pour votre propre sûreté, quand il vous envoyait de Rome des courriers, lesquels étaient arrivés l’affaire étant encore intacte, vous n’avez pu, même alors, être ramené au devoir, sinon par la tendresse filiale, du moins par le sentiment de votre sûreté. Il appelle l’accusé ; celui-ci ne répond pas. Il appelle l’accusateur : considérez, Romains, comme la fortune elle-même semblait s’opposer à la folie de Verrès, et favoriser la cause de Sthénius. L’accusateur appelé, Pacilius, je ne sais pourquoi, ne répondit point, ne se présenta point. Sthénius eût-il été présent à l’accusation portée contre lui ; eût-il été manifestement convaincu de crime, l’accusateur ne paraissant point, Sthénius ne devait pas être condamné. En effet, si un accusé pouvait être condamné en l’absence de l’accusateur, je n’aurais pas traversé de Vibone à Vélie, sur une frêle barque, au milieu des esclaves fugitifs et des pirates en armes, au milieu de vos poignards, faisant hâte au péril de ma vie, dans la seule crainte que vous ne fussiez plus au nombre des accusés, si je n’arrivais pas à temps ! Le plus ardent de vos vœux était que je ne comparusse pas au moment où je serais appelé ; pourquoi donc n’avez-vous pas voulu que la même circonstance profitât à Sthénius, dont l’accusateur ne se présentait pas ? Verrès a tout fait pour que l’affaire se terminât comme elle avait commencé ; celui qu’il avait fait accuser, quoique absent, il le condamne en l’absence de l’accusateur.
XLI. On lui annonçait, au moment même, ce que son père lui avait déjà écrit avec d’amples détails, que l’affaire avait été agitée dans le sénat ; que, dans une assemblée du peuple, le tribun M. Palicanus s’était plaint du procès intenté à Sthénius ; que moi-même, dans le collège des tribuns, dont un édit unanime défendait à toute personne condamnée pour crime capital de rester à Rome, j’avais plaidé la cause de Sthénius, et qu’après m’avoir entendu exposer l’affaire comme je le fais aujourd’hui, et montrer que cette condamnation était nulle, ils avaient unanimement décidé que : l’édit n’empêchait pas Sthénius de rester à Rome. À ces nouvelles, il craignit enfin, et se troubla ; il fait un faux sur ses registres, et, par là, il s’est perdu, en s’ôtant tout moyen de défense. En effet, s’il disait, pour sa défense : On peut recevoir une dénonciation contre un absent ; aucune loi dans les provinces ne s’y oppose : la défense serait mauvaise, mais du moins aurait l’air d’une défense. Enfin, en désespoir de cause, il pouvait recourir à ce dernier refuge : Qu’il a péché par ignorance ; qu’il croyait être dans son droit. Quelque misérable que soit cette défense, ce serait toujours dire quelque chose. Il efface la vérité de ses registres, et y inscrit faussement que Sthénius était présent lorsqu’on l’a dénoncé.
XLII. Ici, voyez dans combien de filets il s’est