Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/242

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le plus considérable dans le territoire de Léontini, s’assemblèrent et députèrent à Apronius, Andron Centorbe, le plus considéré et le plus illustre de leur ville (c’est le même que la ville de Centorbe a envoyé à ce jugement comme député et comme témoin) ; ils le députèrent à Apronius pour plaider auprès de lui la cause des agriculteurs, pour le prier de ne pas exiger des agriculteurs de Centorbe plus de trois médimnes par arpent. On l’obtint à peine d’Apronius comme un bienfait insigne pour ceux qui alors même n’avaient pas encore déserté leurs champs. En l’obtenant, on obtenait évidemment qu’il fût permis de donner trois dîmes pour une. Si ce n’était pas pour vous, Verrès, qu’Apronius agissait, on vous eût demandé de ne pas donner plus d’une dîme, plutôt que de demander à Apronius de n’en pas donner plus de trois. J’omets pour le moment tous les traits particuliers du despotisme et de la tyrannie d’Apronius envers les cultivateurs ; je ne nomme pas ceux auxquels il a enlevé tout leur blé, auxquels il n’a rien laissé non seulement de leur récolte, mais de leurs biens ; apprenez seulement quel profit il a tiré de ces trois médimnes qu’il avait accordés comme un bienfait et comme une grâce.

XLIX. Suivant les déclarations, il y a trente mille arpents dans le territoire de Léontini. Trois médimnes, pris sur chaque arpent, font quatre-vingt-dix mille médimnes, c’est-à-dire, cinq cent quarante mille boisseaux. Déduisez deux cent seize mille boisseaux qui sont le prix des dîmes, il reste trois cent vingt-quatre mille boisseaux. Ajoutez trois cinquantièmes de la somme totale, cinq cent quarante mille boisseaux, c’est-à-dire, trente-deux mille quatre cents boisseaux (car on exigeait en sus trois cinquantièmes de tous les cultivateurs), nous aurons trois cent cinquante-six mille quatre cents boisseaux de blé. Mais j’avais annoncé un bénéfice de quatre cent mille. Aussi je ne parle point dans ce calcul de ceux à qui l’on n’a pas permis de transiger pour trois médimnes par arpent. Mais afin de remplir toute ma promesse, même d’après ce calcul, plusieurs étaient obligés de donner pour surcroît deux sesterces par médimne, plusieurs cinq ; on ne donnait pas moins d’un sesterce. Prenons le moins ; puisque nous avons compté quatre-vingt-dix mille médimnes, il fallait ajouter, ce qui était quelque chose d’inouï et d’affreux, quatre-vingt-dix mille sesterces[1]. Et il osera encore nous dire qu’il a haussé l’adjudication des dîmes, lorsque, sur le même territoire, il a enlevé une fois plus qu’il n’a envoyé au peuple romain ! Vous avez affermé les dîmes du territoire de Léontini deux cent seize mille boisseaux. C’est beaucoup, si c’est d’après la loi ; c’est peu, s’il n’y a de loi que votre caprice ; c’est peu, si vous appelez dîmes ce qui n’était que la moitié. Vous auriez pu affermer beaucoup plus la récolte annuelle de la Sicile, si le sénat ou le peuple romain vous eussent ordonné de le faire ; car il est souvent arrivé que quand on affermait les dîmes d’après la loi d’Hiéron, elles ont été affermées autant qu’elles le furent d’après la loi de Verrès. Lisez l’adjudication des dîmes sous la préture de Norbanus. BAIL DU CANTON DE LÉONTINI, PASSÉ SOUS C. NOIRBANUS. Cependant personne alors n’était poursuivi pour déclaration

  1. 11, 250 liv. A.