Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/245

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que nos campagnes tributaires ont été ravagées et dépeuplées par Verrès, que Verrès a pillé et vexé la province : je prouve tous ces faits par les registres publics des villes les plus célèbres, et par les dépositions particulières de leurs premiers citoyens.

LIII. Que voulez-vous de plus ? attendez-vous que L. Metellus, qui, d’autorité et par le pouvoir de sa place, a empêché un grand nombre de Siciliens de déposer contre Verrès, dépose lui-même, quoique absent, contre les crimes, la cupidité et l’audace de l’accusé ? Je ne le pense pas. Mais lui ayant succédé, il pourrait être mieux instruit que tout autre. — Oui ; mais il est retenu par l’amitié. — Il doit nous informer de l’état de sa province. — Il le doit ; mais on ne l’y force point. Quelqu’un attend-il donc le témoignage de L. Métellus contre Verrès ? Personne. Quelqu’un le demande-t-il ? je ne le pense pas. Que sera-ce donc, si je prouve par le témoignage et par une lettre de L. Métellus, que tous ces faits sont véritables ? que direz-vous alors ? Que Metellus écrit contre la vérité, ou qu’il veut nuire à son ami, ou qu’un préteur ignore l’état de sa province ? Greffier, lisez la lettre que L. Metellus a écrite aux consuls Cn. Pompée et M. Crassus, qu’il a écrite au préteur M. Mummius, qu’il a écrite encore aux questeurs de la ville. LETTRE DE L. METELLUS. J’AI AFFERME LA DÎME DES BLÉS D’APRÈS LA LOI D’HIÈRON. Lorsqu’il écrit qu’il a affermé d’après la loi d’Hiéron, que veut-il dire ? Qu’il a fait comme tous les préteurs, excepté Verrès. Lorsqu’il écrit qu’il a affermé d’après la loi d’Hiéron, que veut-il dire ? Qu’il a rendu aux Siciliens ce que Verrès leur avait enlevé, les bienfaits de nos ancêtres, leurs lois, les conditions de leur alliance, de leur traité, de leur amitié avec nous. Il dit combien il a affermé la dîme de chaque territoire. Que dit-il ensuite ? Lisez la suite de la lettre. JE N’AI RIEN NÉGLIGE POUR ADJUGER LES DÎMES LE PLUS HAUT POSSIBLE. Pourquoi donc, Métellus, les adjudications n’ont-elles pas été plus fortes ? C’est que j’ai trouvé les terres abandonnées, les campagnes désertes, la province pauvre et ruinée. Mais, puisqu’on a ensemencé des terres, comment s’est-il trouvé quelqu’un qui voulût le faire ? Lisez la lettre. LETTRE DE MÉTELLUS. Il a écrit, dit-il, aux laboureurs ; arrivé dans la Sicile, il les a rassurés, il a interposé son autorité ; Metellus enfin leur a presque donné des gages pour leur persuader qu’il ne suivrait en rien l’exemple de Verrès. Quel est donc l’objet pour lequel il dit s’être donné tant de peine ? Lisez : POUR ENGAGER LES CULTIVATEURS QUI RESTAIENT À SEMER LE PLUS QU’IL SERAIT POSSIBLE. Les cultivateurs qui restaient ? Qu’est-ce que cela veut dire, qui restaient ? à quelle guerre, à quelle dévastation avaient-ils échappé ? quelle si grande calamité, Verrès, quelle guerre si longue et si désastreuse a désolé la Sicile sous votre préture, pour que votre successeur ait dû comme recueillir et ranimer ce qui restait de laboureurs ?

LIV. La Sicile a été anciennement dévastée dans les guerres de Carthage ; elle l’a été aussi de notre temps et du temps de nos pères ; deux fois elle a été en proie à des armées d’esclaves fugitifs : cependant on ne l’a pas vue dépeuplée ainsi d’agriculteurs ; seulement on a été une année sans avoir de récolte, ou parce qu’on n’avait pas semé, ou parce qu’on avait perdu la moisson ; mais le nombre des propriétaires et des cultivateurs était toujours le même ; ceux qui avaient succédé dans