Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/479

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dence, qu’étant questeur il avait contribué plus que personne à souffler parmi les soldats la révolte et la sédition. Je ne lis pas même les dépositions relatives aux six cent mille sesterces qu’il avait reçus pour l’affaire de Safinius, et qu’il garda frauduleusement, comme il fit depuis dans le procès d’Oppianicus. J’omets tous ces détails, et beaucoup d’autres reproches qui lui furent faits en présence du tribunal. Je dis seulement que P. et L. Cominius, chevaliers romains éloquents et distingués, ses accusateurs, soutinrent alors contre Stalénus ce que je soutiens aujourd’hui contre Attius. Les Cominius disaient comme moi, que Stalénus avait reçu de l’argent d’Oppianicus pour acheter les suffrages ; Stalénus prétendait l’avoir reçu pour ménager une réconciliation. Ce rôle de conciliateur et d’honnête homme dont il empruntait le masque, faisait rire comme ces statues dorées, placées par ses soins auprès du temple de Juturne avec l’inscription que STALÉNUS AVAIT RÉCONCILIÉ DES ROIS. On produisait au grand jour toutes ses ruses et toutes ses perfidies ; on déroulait le tableau d’une vie tout entière vouée à l’intrigue ; on faisait voir par quel honteux trafic il réparait au forum les torts de la fortune ; on trouvait la cause de la paix et de la concorde mal placée dans ses mains mercenaires. Aussi Stalénus, alléguant pour sa défense les mêmes raisons qu’Attius allègue aujourd’hui, fut condamné. Les Cominius, soutenant ce que je n’ai pas cessé de soutenir, gagnèrent leur cause. Ainsi par la condamnation de Stalénus, il a été décidé qu’Oppianicus a voulu corrompre les juges, et qu’il a donné de l’argent à l’un d’eux pour acheter les suffrages : car, je le répète, le coupable est nécessairement ou Cluentius ou Oppianicus ; or on ne trouve pas la moindre trace d’un denier donné par Cluentius à aucun juge ; et l’on voit, à la fin du procès, retirer de chez un juge l’or d’Oppianicus. Loin donc que l’arrêt prononcé contre Stalénus forme un préjugé nuisible à notre cause, comment ne pas voir qu’il est en notre faveur un puissant argument ?

XXXVII. Jusqu’ici je vois que la condamnation de Junius est moins un véritable jugement qu’un acte de violence, commandé par une multitude égarée, et un tribun séditieux. Si l’on veut donner à cet acte le nom de jugement, il faut en même temps convenir que l’amende imposée à Junius n’a pas le moindre rapport avec la cause que je défends. La condamnation de Junius fut donc un abus de la force ; celles de Bulbus, de Popiliius et de Gutta ne sont point contraires à Cluentius ; celle de Stalénus lui est même favorable. Voyons si nous ne trouverons pas quelque autre jugement qui serve encore à sa justification.

Ne vit-on pas à son tour paraître en justice C. Fidiculanius Falcula, qui, n’ayant assisté, comme juge suppléant, qu’à un petit nombre d’audiences, avait cependant voté contre Oppianicus ? circonstance qui, plus que le reste, excitait l’indignation publique. Il y parut ; et même il y parut deux fois : car Quintius, dans ces assemblées séditieuses et turbulentes qu’il convoquait chaque jour, avait soulevé contre lui tous les esprits. Dans un premier procès on demanda qu’il fût, comme Junius, condamné à une amende, pour avoir pris séance contre la loi