déjà si considérable en elle-même, mais, parmi les nobles qui ont obtenu cet honneur dans notre république, peu l’ont obtenu comme moi, et personne avant moi parmi les hommes nouveaux.
II. En effet, si vous voulez interroger vos souvenirs, vous trouverez que ceux des hommes nouveaux qui ont été investis de la dignité consulaire, sans en avoir été repoussés d’abord, n’y sont enfin parvenus qu’après des peines infinies, et à la suite de quelque circonstance heureuse ; qu’ils avaient déclaré leurs prétentions plusieurs années avant leur préture, et passé l’âge requis par les lois ; que ceux qui l’ont sollicitée en temps opportun, ont commencé par être refusés ; que je suis le seul de tous les hommes nouveaux, que nous puissions nous rappeler, qui ai demandé le consulat dès qu’il m’a été permis de le faire, qui l’ai obtenu dès que je l’ai demandé ; et cette magistrature, que j’ai sollicitée du jour où la loi m’y autorisait, ne paraîtra pas avoir été surprise à la faveur de concurrents, ni arrachée par des prières incessantes, mais accordée plutôt au mérite personnel du solliciteur. C’est donc pour moi, je le répète, une gloire insigne d’être, après tant d’années, le premier homme nouveau que vous ayez nommé consul, et cela sur ma première demande et des mon temps légal ; mais ce qui est encore pour moi plus honorable, ce qui me distingue le plus, c’est que, dans les comices où je fus élu, vous déclarâtes votre choix non par la voie du scrutin, dépositaire muet de la liberté des suffrages, mais par vos acclamations ; témoignage vivant de votre affectueuse bienveillance envers moi. Ainsi encore, ce ne sont pas les votes des dernières centuries, mais le concours des premières ; ce n’est pas la voix des hérauts, mais la voix unanime du peuple romain qui m’a proclamé consul.
Ce bienfait, Romains, si grand, si extraordinaire, et dont l’immense valeur élève mon âme et la remplit de joie, ne fait qu’exciter davantage ma vigilance et ma sollicitude. Mille pensées graves m’agitent et ne me laissent de repos ni le jour ni la nuit. La première de toutes est de maintenir la dignité du consulat, tâche énorme et difficile pour tout autre, mais pour moi principalement qui ne dois espérer aucune indulgence si je commets une faute, et n’attendre que des éloges médiocres et arrachés à l’envie, si j’accomplis vigoureusement mes devoirs ; qui enfin ne dois compter dans mes incertitudes, ni sur les conseils de la noblesse, ni sur sa coopération sincère dans les circonstances épineuses.
III. Que si alors, j’encoure quelque blâme, je le souffrirai, Romains, avec plus de tranquillité ; mais je connais des hommes qui, s’ils viennent à croire que j’ai failli par réflexion ou même par mégarde, vous blâmeront tous tant que vous êtes de m’avoir donné la préférence sur le corps de la noblesse. Néanmoins, il n’est pas d’afflictions auxquelles je ne me résigne d’avance, plutôt que de ne pas agir dans mon consulat de telle sorte que toutes mes inspirations, tous mes actes fassent applaudir ce que vous avez résolu, ce que vous avez fait pour moi. À ces difficultés de ma