Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/715

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nesse, ni une foule de parents distingués, solliciter le peuple romain pour mon retour comme pour celui de l’illustre et noble Popillius. On n’a pas vu un fils dans la force de l’âge, et déjà connu ; on n’a pas vu, comme pour Métellus, ce grand et vertueux citoyen, L. et C. Métellus, anciens consuls, et leurs enfants ; Métellus Népos, qui demandait alors le consulat ; les Lucullus, les Servilius, les Scipions, tous les rejetons de cette famille, supplier le peuple romain pour mon rappel, les larmes aux yeux et en habits de deuil ; mon frère, qui m’a témoigné la tendresse d’un fils, la sollicitude d’un père ; qui m’a prouvé qu’il m’aimait vraiment comme un frère, est le seul dont les larmes, dont la douleur profonde, dont les supplications continuelles aient fait regretter mon nom et renouvelé le souvenir de mes services. Résolu d’ailleurs, si vous ne me rendiez pas à son amour, à subir le même sort que moi, jaloux de partager et le même exil et le même tombeau, ni la difficulté de l’entreprise, ni l’abandon où il se trouvait, ni la violence et les armes de mes ennemis n’ont pu l’intimider. Un autre défenseur que j’ai eu dans mon infortune, non moins ardent et non moins assidu, c’est C. Pison, mon gendre, dont la tendresse égale le courage. Son zèle pour mes intérêts lui a fait braver les menaces de mes ennemis ; l’inimitié d’un consul, mon allié et son parent, lui a fait négliger de se rendre dans le Pont et dans la Bithynie, dont il était questeur. Jamais il n’y eut de décret du sénat au sujet de Popillius ; jamais dans cet ordre on ne fit mention de Métellus. Tous deux furent rappelés, sur la demande d’un tribun, après la mort de leurs ennemis, sans aucune décision du sénat, quoique l’un eût été victime de son dévouement pour cet ordre, et que l’autre eût voulu éviter les meurtres et la violence. Quant à Marius, le troisième consulaire avant moi, qui, de nos jours, a été jeté hors de sa patrie par les flots des discordes civiles, loin d’avoir été rappelé par le sénat, le sénat s’est vu presque anéanti par son retour. Les magistrats ne se sont pas réunis pour ces grands hommes, le peuple romain n’a pas été convoqué comme pour la défense de la république, l’Italie ne s’est point émue, les villes municipales et les colonies n’ont point porté de décrets.

Aussi, rétabli par vos décisions, rappelé par le peuple romain, redemandé par la république, rapporté, pour ainsi dire, entre les bras de toute l’Italie, ayant recouvré ce qui n’était pas en mon pouvoir, je ferai en sorte, pères conscrits, de ne point renoncer aux biens qui sont en moi, surtout quand j’ai retrouvé ce que j’avais perdu, et que je n’ai jamais perdu le courage ni l’amour pour ma patrie.