Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/100

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dant le même intérêt pour nous, et Cicéron l’estimait, puisque, dans le traité des Devoirs, II, 9, il renvoie à cet ouvrage pour ce qu’il aurait à dire de l’amitié. Il paraît que ce grand traité de morale, commencé avant ces deux dialogues, ne fut achevé que lorsqu’ils furent publiés.

Des critiques allemands prétendent que le livre sur l’Amitié est entièrement politique, et qu’il ne s’agit pas ici de l’amitié dans un sens moral, mais des liaisons de parti. Cette opinion est ancienne ; car le baron de Grimm, qui avait étudié sous Ernesti, la soutient en ces termes dans sa Correspondance littéraire, en parlant de la nouvelle traduction de Langlade, mai 1764 : « Il est honteux et incroyable à quel point l’étude des anciens est négligée. Il peut être permis aux femmes et aux gens du monde de prendre le dialogue que Cicéron a inscrit de Amicitia pour un traité sur l’amitié ; mais les gens de lettres ici n’en savent guère davantage, et cela n’est pas pardonnable. Amicitia, du temps de Cicéron, ne signifiait pas tant amitié que parti. Quærere amicitias veut dire, chercher à se jeter dans un parti. Voilà pourquoi Horace (Art poét. v. 167) dit que c’est là l’occupation de l’âge qui suit la jeunesse, parce que c’est l’âge de l’ambition, et que dans les républiques l’ambition regarde avec raison l’appui d’un parti puissant comme essentiel à ses vues. Il est impossible d’entendre le premier mot du traité de Cicéron quand on ne sait pas cela, etc. » Cette opinion, à force d’exagération, devient fausse, et il en est presque toujours ainsi des idées de ce correspondant littéraire des princes d’Allemagne, trop ami de Diderot pour se tenir dans les limites de la vérité. Mais si l’on se contente de dire que Cicéron laisse entrevoir l’homme d’état, même lorsqu’il écrit sur des matières philosophiques ; si l’on remarque, par exemple, que très souvent, dans les livres sur les Devoirs, il enseigne moins la morale absolue, que les moyens d’arriver par une vie pure et honorable à cette considération et à cette estime, dont les distinctions sociales, les hautes dignités et la gloire sont le prix ; si l’on ajoute que dans le dialogue sur l’amitié, l’amitié