Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/101

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politique tient aussi quelque place, rien ne sera plus juste que ces observations. L’erreur est de dire que c’est là tout le but du philosophe. Qu’on lise ici la définition de l’amitié, chap. 6, et qu’on veuille bien la comparer avec celle du critique, on verra jusqu’à quel point il faut le croire. Il y a même très peu d’endroits dans tout l’ouvrage (chap. 12, 21, etc.) qui aient pu conduire à cette interprétation si générale et si exclusive. Cicéron y appelle Atticus son ami, et c’est à ce titre qu’il lui adresse son traité sur l’amitié ; Atticus n’était d’aucun parti.

Platon, dans le Lysis ; Aristote, au Liv. VII des Morales ; Plutarque (περὶ πολυφιλίας, πῶς ἄν τις διακρ. τ.κ.τ.φ.) ; Lucien, dans son Toxaris, ont parlé de l’amitié. Qui n’a pas lu ce beau chapitre de Montaigne où l’amitié est si éloquente ? Louis de Sacy, écrivain élégant et pur, connu par sa traduction des Lettres de Pline, fit paraître en 1702 un traité méthodique de l’Amitié, divisé en trois Livres. Dans le premier, il développe la nature de l’amitié, les qualités nécessaires aux amis, les précautions à prendre dans le choix que l’on en fait ; le second explique les devoirs de l’amitié, leurs justes bornes, leur subordination aux autres devoirs ; le dernier regarde les ruptures, les moyens de les prévenir, la conduite qu’on doit tenir quand on ne peut les éviter, les obligations dont les amis vivants sont chargés envers les amis qui ne sont plus. Un style correct et facile, des détails pleins de grâce, des sentiments doux et affectueux, auraient dû soutenir la réputation de cet ouvrage. Il est dédié à madame de Lambert, qui fit elle-même un traité de l’Amitié, publié en 1736, trois ans après sa mort, par Saint-Hyacinthe, auteur du Chef-d’œuvre d’un inconnu. Ce traité, dit Voltaire, fait voir qu’elle méritait d’avoir des amis. Sacy et madame de Lambert ont aussi écrit tous deux sur la gloire. C’était à Cicéron qu’il convenait d’en parler ; mais le traité de la Gloire est perdu.

Je regrette de ne pouvoir donner ici une idée plus étendue de ces divers ouvrages sur l’amitié ; j’en citerai dans les notes quelques fragments.

J. V. L.