Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/177

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présence, devant les témoins requis. Peu de temps après ; il est livré au supplice. Ceux qu’il avait institués ses héritiers dans son testament réclament la succession. Son plus jeune frère, qui s’était porté son accusateur, revendique l’héritage en sa qualité d’agnat. Aucune loi formelle ne peut s’appliquer à ce cas ; et cependant on en cite un grand nombre d’après lesquelles on élève la question de savoir si Malléolus avait ou non le droit de tester. » C’est là une question légale qui dérive de l’analogie. Nous avons montré quelles sont les différentes espèces de questions légales ; parlons maintenant de la question judiciaire.

XIV. Celle-là se présente lorsque, tout en convenant du fait, on recherche si son auteur était ou non dans son droit. Elle se divise en deux espèces, l’une absolue, l’autre accessoire. Elle est absolue, quand nous soutenons que l’action peut se défendre en elle-même, et sans recourir à aucune considération étrangère. Ainsi : « Un comédien interpella le poète Accius par son nom, en plein théâtre : Accius le poursuivit pour injures ; celui-ci se contenta de répondre pour sa défense qu’il était permis de nommer celui qui se proclamait l’auteur de la pièce représentée. » La question est accessoire, lorsque la défense, faible par elle-même, emprunte le secours d’une circonstance étrangère. Ces circonstances sont au nombre de quatre : l’aveu du crime, le recours, la récrimination, l’alternative. Par l’aveu, l’accusé demande qu’on lui pardonne ; il a pour cela deux moyens, la justification et la déprécation. La justification, quand il proteste qu’il a agi sans desseins. Il se rejette alors sur la fortune, sur l’ignorance, la nécessité. Sur la fortune, comme fit Cépion devant les tribuns, pour se justifier de la perte de son armée : l’ignorance, comme cet homme qui fit mettre à mort l’esclave de son frère, qui avait assassiné son maître, avant d’avoir ouvert le testament qui affranchissait cet esclave : la nécessité, comme celui qui n’a pas rejoint au jour marqué par son congé, parce que le débordement des eaux lui a fermé le passage. Dans la déprécation, l’accusé convient du crime et de la préméditation ; mais il n’en implore pas moins la pitié. On ne peut guère en faire usage devant un tribunal, à moins que l’on ne parle pour un homme que recommandent plusieurs belles actions reconnues. Dans ce cas, l’orateur employant le lieu commun de l’amplification, dira : « Quand bien même l’accusé serait coupable, il serait juste néanmoins de lui pardonner en faveur de ses services passés ; mais il ne demande pas de pardon. » Ce n’est donc pas en justice que ce moyen est convenable ; mais on peut s’en servir devant le sénat ou devant un général et son conseil.

XV. La question repose sur la récrimination, lorsque, sans nier le fait, nous prétendons y avoir été contraints par la faute d’autrui ; par exemple : « Oreste, pour se défendre, rejette son crime sur sa mère. » La question se fonde sur le recours, quand on repousse, non pas le fait, mais la culpabilité, en la rejetant sur quelqu’un ou sur quelque chose ; sur quelqu’un, ainsi : « Un homme est accusé d’avoir tué Sulpicius ; il en convient, mais il allègue pour sa défense un ordre des consuls, et prétend que non seulement ils lui ont prescrit