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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/184

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nous ne soyons arrêtés ni par de faux pas, ni par des obstacles, s’il nous arrive un jour de joindre aux préceptes de l’art l’exercice assidu de la pratique.

IX. Passons maintenant aux différentes parties de la question de droit. Lorsque l’intention du législateur paraît en contradiction avec la lettre de la loi, si nous soutenons le texte même, voici les moyens dont nous ferons usage aussitôt après la narration. D’abord l’éloge de celui qui a fait la loi ; puis la lecture du texte ; ensuite une apostrophe aux adversaires : savaient-ils qu’il y eût une disposition semblable dans la loi, dans le testament, dans le contrat, ou dans tout autre écrit se rapportant à la cause ? après cela, le rapprochement de la lettre de la loi avec les déclarations des adversaires : à quoi le juge doit-il s’en rapporter d’un texte rédigé avec soin, ou d’une interprétation insidieuse ? On combat ensuite avec dédain le sens que les adversaires ont imaginé d’attribuer à la loi ; quelle raison, demandera-t-on, aurait empêché le législateur de l’exprimer clairement, s’il l’avait voulu ? Alors on exposera le sens véritable et le motif qui l’a dicté ; on en démontrera la clarté, la précision, la justesse, la parfaite convenance ; à l’appui, l’on citera les exemples de jugements rendus conformément à la lettre de la loi, malgré les efforts des adversaires pour faire valoir l’esprit et l’intention. On fera voir enfin le danger qu’il y a de s’écarter du texte. Ce lieu commun s’emploie contre celui qui, tout en faisant l’aveu d’une action contraire aux termes d’une loi, ou aux dispositions d’un testament, cherche néanmoins à s’en justifier.

X. Si nous parlons en faveur de l’interprétation de la loi, nous louerons d’abord l’auteur du texte de la judicieuse concision avec laquelle il n’a dit que ce qu’il était nécessaire de dire, abandonnant à notre intelligence ce qui n’avait pas besoin d’être expliqué. Nous ajouterons que c’est le propre de la mauvaise foi de ne s’attacher qu’aux mots et à la lettre, sans tenir compte de l’intention ; que ce qui est écrit ne peut être exécuté ou ne saurait l’être qu’en blessant les lois, les usages, la nature, la justice, l’honneur ; toutes choses dont personne ne niera que le législateur ait voulu la religieuse observation : Eh bien, tout ce que nous avons fait a été fait justement. D’ailleurs l’opinion de nos adversaires est nulle, ou insensée, ou injuste, ou impraticable. Elle répugne à ce qui précède ou à ce qui suit ; elle est en opposition avec le droit commun, avec les autres lois, ou avec des jugements déjà rendus. Et nous citerons ensuite des exemples de décisions fondées sur l’intention de la loi et contrairement au texte ; nous donnerons de rapides extraits de lois et de contrats dans lesquels il faut interpréter la volonté qu’ont exposée les termes. C’est un lieu commun contre celui qui rapporte un texte, sans rechercher l’intention de son auteur. Lorsque deux lois sont contradictoires, il faut considérer d’abord s’il n’y a pas abrogation ou