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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/203

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nous avons peu de chose à dire de sa perversité : leur est-il inconnu ; nous tiendrons à le dévoiler, pour qu’ils puissent se garantir de lui ; car ils sont loin de lui ressembler, et nous nous flattons qu’ils le désapprouveront hautement. Empruntons-nous notre exorde à l’objet même du discours ; nous dirons que nous ne savons ce qu’il faut louer davantage : que nous craignons, tout en parlant de beaucoup de choses, d’en omettre un plus grand nombre encore ; et autres tournures du même genre. Pour blâmer, nous emploierons les tournures contraires.

VII. Lorsqu’on a tiré l’exorde de l’une des circonstances que je viens d’indiquer, on a rarement besoin de le faire suivre d’une narration ; mais s’il en fallait une, pour exposer, dans un but d’éloge ou de blâme, quelque action de celui dont nous parlons, on se reportera au premier livre pour les préceptes qui se rapportent à cette partie. Voici comment doit se faire la division : on expose d’abord les choses que l’on va louer ou blâmer ; ensuite on dispose chacune d’elles en suivant l’ordre du temps où elle a été faite, de manière à faire comprendre combien elle a demandé de précaution et d’habileté. On entre après dans le détail des vertus ou des vices, des avantages ou des défauts du corps, des choses extérieures, et du parti que l’esprit en a tiré. L’ordre à suivre dans ce tableau de la vie est le suivant : Les choses extérieures, et en premier lieu la naissance. On parle des ancêtres de son héros. Veut-on le louer ; s’ils sont illustres, on dit qu’il les a égalés ou surpassés ; s’ils sont obscurs, qu’il doit tout à son mérite, et rien à celui de ses pères. Veut-on le blâmer ; on montre, dans le premier cas, qu’il a déshonoré sa race, et dans le second, qu’il a trouvé moyen de la rabaisser. En second lieu, l’éducation : dans l’éloge, on la représente soigneusement et librement dirigée pendant toute l’enfance du héros, d’après les meilleurs principes ; dans le blâme, on fait le contraire. Il faut passer ensuite aux avantages du corps. Parle-t-on des dons de la nature dans un but de louange ; le héros a-t-il l’élégance et la beauté ; il les a fait tourner à son honneur, au lieu d’en faire comme tant d’autres, des instruments de ruine et de honte. Possède-t-il à un degré remarquable la force et l’agilité ; c’est par d’honnêtes et habiles exercices qu’il l’a atteint. Jouit-il d’une santé robuste ; c’est le fruit de ses bonnes habitudes et de sa tempérance. Dans le blâme, si ces mêmes avantages existent, on dira qu’il a fait un mauvais usage des dons que le dernier des gladiateurs peut tenir comme lui du hasard et de la nature. S’il n’a plus que la beauté, on dira que c’est par sa faute et son intempérance que le reste a péri. Après quoi, revenant aux choses extérieures, on considère les vertus ou les vices dont elles sont devenues la source. On s’étend sur l’opulence ou la pauvreté de son client ; sur ses places, ses honneurs, ses liaisons, ses inimitiés ; sur le courage dont il a fait preuve contre ses ennemis, et le motif qui les lui a suscités ; sur la bonne foi, la bienveillance, l’affection qu’il a montrées à ses amis. On fait connaître sa conduite dans la bonne ou dans la mauvaise fortune ; le caractère qu’il a déployé dans l’exercice du pouvoir. S’il n’existe plus, on rappelle les circonstances qui ont accompagné sa mort, et celles qui l’ont suivie.

VIII. Toutes les fois qu’il sera question des qualités de l’âme, il en est quatre qu’il faudra faire ressortir. Pour louer une action,