Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/581

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trésors que vous avez puisés dans la patrie même des sciences, puisque Rome ne vous les offrait pas, il serait indigne de vous de rester confondu parmi les orateurs vulgaires. À quoi bon auriez-vous été exercé par Pammène, l’homme le plus éloquent de la Grèce ? et qu’auraient servi les leçons de l’ancienne académie, et celles d’Aristus, mon hôte et mon ami, héritier de cette savante école, si nous devions ressembler à la plus grande partie de ceux qui parlent en public ? Ne voyons-nous pas qu’à peine chaque génération a produit deux orateurs estimables ? Galba excella seul parmi tous ceux de son âge, et nous savons qu’il ne fut égalé ni par Caton, qui était plus vieux que lui, ni par deux autres contemporains, qui étaient plus jeunes, Lépidus et ensuite Carbon. Quant aux Gracques, leurs harangues se distinguent par un style plus facile et une marche plus libre. Toutefois l’éloquence n’était pas encore, de leur temps, portée à sa perfection. Enfin parurent Antoine, Crassus, puis Calta, Sulpicius, Hortensius. Je n’en dis pas davantage, je dis seulement que s’il m’était arrivé d’être confondu dans la foule, quoique une plus grande concurrence de talents rende le triomphe plus difficile que jamais…..


NOTES SUR LE BRUTUS.

I. Alienissimo reipublicæ tempore exstinctus. Cicéron avait été nommé augure en 700, proconsul de Cilicie en 702 ; il revint en 703, et arriva aux portes de Rome le 4 janvier 704. Hortensius mourut donc en 703, au moment où la guerre civile était près d’éclater entre César et Pompée.

Morte doluisse. Sophocle, dit-on, porta le deuil d’Euripide, son rival, qui mourut quelque temps avant lui.

II. Armis egere rempublicam, quæ didiceram ftractare. La république, tombée aux mains de César, ne reconnaissait plus d’autre empire que celui de la force. Les armes faisaient taire les lois, et tout, au sénat et devant les tribunaux, se décidait par la volonté d’un seul. Il n’y avait plus de place, dans un tel gouvernement, pour l’éloquence et pour le conseil. — On refusa d’entendre les défenseurs de la paix. Cicéron exprime le même regret dans son Discours sur le rappel de Marcellus, chap. 5 : « Pour moi, dit-il, dans le cours de nos dissensions, j’ai toujours pensé qu’il fallait s’occuper de la paix, et j’ai su avec douleur qu’on la rejetât, qu’on refusât même d’écouter ceux qui la réclamaient avec instance. »

III. Rerum nostrarum et communium…. casus. Le désordre de sa fortune, les troubles excités dans Rome par Dolabella, son gendre, le divorce de sa fille Tullia, l’ingratitude de son frère Quintus et de son neveu, qui essayèrent de le noircir auprès de César, afin de se concilier les bonnes grâces du vainqueur ; enfin les dangers qu’il courut à Brindes de la part d’Antoine, et les inquiétudes où il vécut pendant près d’un an, c’est-à-dire, jus-qu’au retour de César ; voilà pour nostrarum. La bataille de Pharsale et l’anéantissement de la république, voilà pour communium.

IV. Quanquam illud Hesiodeum laudatur a doctis. Hésiode, poème des Travaux et des Jours, vers 349 :

Εὐ δ’ἀποδοῦναι
Αὐτῷ τῷ μέτρῳ, καὶ λώιον, αἵκε δύνηαι.

Cicéron cite la même maxime, de Officiis, livre I chap. 15.

IV. Nec enim ex novis, etc. Le malheur des temps l’a empêché de rien composer de nouveau. — Neque ex conditis. Ces mots paraissent désigner quelques anciens discours qui n’étaient pas achevés ; car on sait que Cicéron travaillait de nouveau ses discours après les avoir prononcés. — Aditus… obstructus est. Ce n’est pas sans doute qu’il fût dans l’impossibilité de revoir et de perfectionner les ouvrages dont il parle ; mais les maux de l’État ne lui laissaient point l’esprit assez libre. Cette explication est confirmée par une phrase du Livre II, chap. 1, de Officiis (atque utinam respublica stetisset ! etc.). Voyez ce passage.

V. Ut possis, rogo. Ernesti trouve plaisant qu’on prie un homme de pouvoir. Mais comment ne voit-il pas que, dans l’idée de celui qui parle, le pouvoir est tout à fait dépendant du vouloir, et que ceci n’est qu’une simple formule de politesse ?

Causam Dejotari. Brutus étant auprès de César, à Nicée en Bithynie (d’autres disent à Nice en Ligurie), l’an 706, défendit le roi de la Gallo-Grèce, Déjotarus, qui avait pris parti pour Pompée, et obtint son pardon. Deux ans plus tard, Cicéron défendit à Rome le même Déjotarus, accusé d’avoir voulu attenter à la vie de César, lorsque celui-ci était dans sen palais. Sur le Discours de Brutus, voyez les Lettres à Atticus, XII, I ; et Tacite, Dialogue sur les Orateurs, chap. 21.

VIII. Tamen ante Periclem. Périclès mourut la troisième année de la guerre du Péloponnèse, l’an 429 avant J. C. Lorsque Thucydide écrivait l’histoire de cette même guerre, on comptait plus de 1130 ans depuis Cécrops, et seulement 342 depuis la fondation de Rome.

Et paullo seniorem etiam Solonem. On rapporte l’établissement des lois de Solon à l’an 594, et l’usurpation de Pisistrate à l’an 560 avant J.C. Thémistocle gagna la