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Page:Cicéron - Œuvres complètes Nisard 1864 tome 4.djvu/197

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DE LA DIVINATION, LIV. I.

dans sa course enflammée, s’éteignit dans un obscur horizon ; lorsqu’un citoyen romain périt au milieu d’un jour serein, frappé par la foudre terrible, ou enfin lorsque la lourde masse de la terre s’ébranla ! alors d’effrayants fantômes montrèrent pendant la nuit leurs formes variées, annonçant la guerre et les dissensions. Des devins furieux semèrent leurs oracles et leurs lugubres menaces en tous lieux. Ainsi tout ce qui est arrivé au peuple romain apporté par le cours éternel des destins, le père des Dieux l’annonçait au ciel et à la terre par des signes répétés et éclatants.

XII. « Tous ces événements, prédits autrefois par l’aruspice étrurien d’origine lydienne, sous le consulat de Torquatus et de Cotta, ont éclaté à la fois sous ton propre consulat. Du haut de l’Olympe étoilé, le maître du tonnerre a frappé les monts sacrés couronnés de ses temples, et embrasé de ses feux le Capitole, siège de l’empire romain ; alors la foudre dévora l’antique statue de Natta renversée ; elle anéantit et les simulacres des Dieux et les lois autrefois dictées par eux. Là se voyait la louve sauvage dont les mamelles remplies arrosaient d’un lait nourrissant les lèvres des nouveau-nés enfants de Mars. Renversée par la foudre, elle tombe arrachée de sa base où reste seulement l’empreinte de ses pieds. Chacun alors feuilletant les écrits et consultant les monuments de la science, trouvait de lugubres prédictions dans les archives de l’Étrurie. Tous ces livres conseillaient d’éviter les discordes fomentées par des nobles méditant d’affreux attentats. Ils parlaient fréquemment de l’anéantissement prochain des lois, ordonnant d’arracher aux flammes les villes et les temples, et de protéger les citoyens contre les meurtriers conjurés. Tels étaient les décrets de l’immuable destin, à moins qu’on ne plaçât sur le sommet d’une colonne l’image sacrée de Jupiter tournée vers l’orient ; car le peuple et l’auguste sénat ne pouvaient dévoiler les trames secrètes que quand la statue, tournée vers le soleil levant, verrait elle-même la Curie et le Forum. Ce ne fut que sous ton consulat que cette image, après beaucoup de retards, fut enfin placée sur le sommet d’une colonne ; et au moment même où Jupiter, le sceptre en main, brillait sur ce haut piédestal, les Allobroges dévoilaient au sénat et au peuple les complots tramés dans l’ombre par des assassins et des incendiaires.

XIII. « C’est donc à bon droit que les anciens dont vous possédez les monuments, et qui gouvernèrent les peuples et les cités au nom de la vertu et de la modération, se distinguèrent par leur zèle ardent pour les Dieux, servant en cela de modèle à vos pères, si remarquables eux-mêmes par leur foi, leur pieté et leur sagesse sans égale. Ces vérités n’échappèrent point à la sagacité de ces philosophes qui, sous les ombrages de l’Académie, ou dans le brillant Lycée, consacrèrent à de studieux loisirs toutes les richesses de leur beau génie. Pour toi, tu te vis arraché du milieu de ces sages dès ta plus tendre jeunesse, et appelé par ta patrie pour défendre tout ce qu’elle avait de noble et de saint. Mais faisant trêve à tes graves soucis, tu viens quelquefois