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Page:Cicéron - Des suprêmes biens et des suprêmes maux, traduction Guyau, 1875.djvu/308

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faisser et tomber en ruine, sans que la Divinité puisse leur faire franchir les bornes fixées par le destin, ni lutter elle-même contre les lois immuables de la nature ? En un mot, ne voyons-nous pas tous les monuments humains céder à la destruction et tomber tout à coup, minés par la vieillesse, les cailloux rouler arrachés de la cime des monts, incapables de résister aux efforts violents d’une durée limitée ? Car ils ne se détacheraient pas tout à coup et ne tomberaient pas en un moment, si depuis un nombre infini de siècles ils avaient soutenu tous les assauts du temps sans y avoir succombé.

Enfin, considère cette vaste enceinte qui embrasse de tous côtés la, terre, ce ciel qui (suivant certains philosophes) enfante tous les êtres et les reçoit après leur dissolution ; tout immense qu’il est, il a commencé et finira un jour, puisqu’un être ne peut en nourrir d’autres sans s’épuiser, ni les réunir à lui-même sans se réparer…

Je n’en doute pas, notre monde est nouveau ; il est encore dans l’enfance, et son origine ne date pas de fort loin. Voilà pourquoi il y a des arts qu’on ne perfectionne et d’autres qu’on n’invente que d’aujourd’hui : c’est d’aujourd’hui que la navigation fait des progrès considérables ; la science de l’harmonie est une découverte de nos jours. Enfin cette philosophie dont j’expose les principes n’est connue que depuis peu, et je suis le premier qui ait pu traiter ces matières dans la langue de ma patrie.

LII
FORMATION DES CORPS CÉLÈSTES PAR LA COMBINAISON DES ATOMES.

Maintenant, comment le concours fortuit des atomes a-t-il posé les fondements du ciel et de la terre, creusé l’abime de l’Océan, réglé le cours du soleil et de la lune ? C’est ce que je vais t’expliquer. Car, je le répète, ce n’est point par un effet de leur intelligence ni par réflexion que les éléments du monde se sont placés dans l’ordre où nous les voyons ; ils n’ont point concerté entre eux les mouvements qu’ils voulaient se communiquer ; mais, infinis en nombre, mus de mille façons diverses, soumis depuis des siècles innom-