phyrs dans le creux des roseaux apprit d’abord aux hommes à enfler un chalumeau champêtre. Insensiblement la flûte, animée par des doigts agiles et accompagnée de la voix, fit entendre ses douces plaintes ; c’est dans les forêts écartées qu’elle fut découverte, dans les bois, dans les solitudes, et on la doit aux doux loisirs des bergers. Ainsi le temps donne peu à peu naissance aux différents arts, et le génie les perfectionne. Ces amusements innocents charmaient leurs ennuis à la suite d’un repas frugal, dans ces moments où le repos est délicieux. Souvent même, étendus en cercle sur un doux gazon, au bord d’un ruisseau, à l’ombre d’un arbre élevé, ils se procuraient à peu de frais des plaisirs simples et purs, surtout dans la riante saison, quand le printemps émaillait la verdure des prairies de l’éclat des fleurs. Alors, au milieu des ris, des jeux, des doux propos, leur muse agreste prenait son essor ; la gaieté leur inspirait d’orner leurs têtes et leurs $paules de couronnes de fleurs et de guirlandes de feuillages, et leurs pieds rustiques frappaient lourdement, sans souplesse et sans mesure, cette terre, leur mère commune, De là naissaient des rires et une joie innocente, parce que la nouveauté de ces plaisirs les rendait plus piquants. Ceux qui ne pouvaient dormir se consolaient de l’insomnie en pliant leur voix à des accents variés ou en promenant leurs lèvres serrées sur des chalumeaux ; tels sont encore aujourd’hui nos amusements pendant la veillée, Nous connaissons les règles de l’harmonie ; mais avec plus de ressources nous ne sommes pas plus heureux que ces anciens habitants des forêts, tous enfants de la terre.
Car le bien présent obtient la préférence, si nous n’avions rien connu de supérieur auparavant ; mais une nouvelle découverte fait tort aux anciennes et change entièrement nos goûts. Ainsi nous avons dédaigné le gland, nous avons renoncé à ces simples couches de feuilles et de gazon ; les dépouilles des bêtes féroces sont tombées même dans le mépris. Cependant je ne doute pas que l’inventeur de ce vêtement grossier n’ait été l’objet de la jalousie générale, que les autres hommes ne l’aient fait périr en trahison et n’aient partagé entre eux sa dépouille sanglante sans en jouir eux-mêmes.
C’étaient donc jadis de simples peaux, c’est aujourd’hui l’or et la pourpre qui sont devenus l’objet de nos soucis et