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Page:Clar - Les Jacques, 1923.djvu/109

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LES JACQUES

marchand d’eau reconnaissable à ses seaux, des gens du commun et des écoliers toujours prêts à s’ébaudir aux spectacles de la rue.

Sur une table surmontée de bâtons étoffés formant une tente légère, Conrad avait posé deux gobelets. À l’un des montants, une chaîne maintenait, à distance convenable des badauds, une jeune guenon s’épuçant avec des mines qui excitaient les rires de la foule. De ses yeux vifs, Conrad eut tôt fait de découvrir frère Loys. Il ne montra point qu’il l’avait aperçu, mais frère Loys n’en douta à l’entendre discourir.

— Nobles dames et estimables sires, oyez ces deux gobelets. Ils sont vides et peu vastes. Un gras moine n’y entrerait, pas plus que riche au Paradis. Je mets en celui-ci une once de patience, un grain de malice, deux sols parisis de bonne humeur, je mêle, je mélange. Passez muscade !

Ayant fait le simulacre de jeter ce qu’il disait dans un des gobelets, Conrad étendit les mains pour une incantation bouffonne. Puis il souleva l’autre gobelet. Au cri d’émerveillement de la foule, un oiselet s’en échappa qui, après avoir voleté autour de la tête du bateleur, s’en vint se poser sur son épaule. Conrad tira ensuite un bouquet, des rubans, et soulevant le second gobelet, n’y trouva rien.

— Le diable est céans, dit-il, puisqu’il n’y a que vide en ceci tout comme en notre bourse, quand

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