Page:Claretie - Jules Verne, 1883.pdf/15

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Nevers rencontreraient aujourd’hui plus d’un sourire sceptique ; mais les coups de revolver du parisien Passe-Partout, de l’Américain Corsican et du Russe Michel Strogoff, — ce courrier du czar traversant les steppes pour porter un ordre, comme d’Artagnan traverse la Manche pour rapporter les ferrets de la reine, — sont acceptés comme détonation d’évangile. Ils ont leurs disciples et leurs croyants. Encore une fois, il faut toujours à l’humanité sa ration de songes. Chacun de nous, sa journée finie, la plupart du temps terne et maussade, éprouve le besoin d’ouvrir une sorte de lucarne sur l’infini. Vivent les contes qui consolent de l’histoire quotidienne ! Et lorsque le fringant Aramis ou Athos le pensif ont amusé, sans les lasser, les générations ; lorsque le prince Rodolphe des Mystères de Paris a vu son grand-duché de Gérolstein envahi par l’opérette et sa Fleur-de-Marie chanter : J’aime les militaires ; lorsque Rodin est mort d’une indigestion de radis noirs ; lorsque les millions d’Edmond Dantès sont devenus la misère, comparés aux milliards que coûtent aujourd’hui les canonnades internationales et les krachs financiers ; lorsque les ruses de Rastignac ont pâli devant