Page:Claretie - Jules Verne, 1883.pdf/20

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M. Verne jette au vent tout ce qui sert de lest à l’aérostat.

« Le ballon, entièrement délesté de tous les objets qu’il contenait, nous fûmes emportés, écrit le romancier, à des hauteurs inappréciables ! L’aérostat vibrait dans l’atmosphère. Le moindre bruit faisait éclater les voûtes célestes. Notre globe, le seul objet qui frappât ma vue dans l’immensité, semblait prêt à s’anéantir » et, au-dessus de nous, les hauteurs du ciel étoile se perdaient dans les ténèbres profondes !

« Je vis l’individu se dresser devant moi !

« Voici l’heure ! me dit-il. Il faut mourir ! Nous sommes rejetés par les hommes ! Ils nous méprisent ! Écrasons-les !

« — Grâce ! fis-je.

« — Coupons ces cordes ! Que cette nacelle soit abandonnée dans l’espace ! la force attractive changera de direction, et nous aborderons au soleil !

« Le désespoir me galvanisa. Je me précipitai sur le fou ; nous nous prîmes corps à corps, et une lutte effroyable se passa ! Mais je fus terrassé, et tandis qu’il me maintenait sous son genou, le fou coupait les cordes de la nacelle.

« — Une ! fit-il.

« — Mon Dieu !…

« — Deux ! trois ! »

« Je fis un effort surhumain ; je me redressai et repoussai violemment l’insensé !

« — Quatre ! » dit-il.

« La nacelle tomba ; mais, instinctivement, je me cramponnai aux cordages, et je me hissai dans les mailles du filet.

« Le fou avait disparu dans l’espace !

« Le ballon fut enlevé à une hauteur incommensurable. Un horrible craquement se fit entendre… Le