Page:Claretie - La Frontière, 1894.djvu/29

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En attendant j’ai voulu, comme je le ferai pour d’autres, saluer les troupiers que j’ai suivis, de loin, avec une sympathie fraternelle. Ce sont des soldats d’une qualité particulière et dont l’esprit doit, comme celui des marins, recevoir je ne sais quelle mystérieuse empreinte de la nature qui les entoure, les éblouit, les menace ou les berce. Ils me semblent surtout heureux dans leur héroïque et dure destinée, parce qu’ils peuvent, si leur âme se prête à la mélancolie, unir l’action, qui nous fait oublier les soucis de la vie, au rêve qui nous en console. J’ai souvent, dans la mêlée confuse et harassante de l’existence quotidienne, envié leurs réveils en pleine lumière, face à face avec le devoir absolu.

Mais quoi ! ils n’analysent ni ne raffinent leurs sensations, les