Page:Claretie - Petrus Borel, le lycanthrope, 1865.djvu/27

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fonde — et pis que des mélancolies — des tiraillements d’estomac.

Au temps où il était encore architecte, il logeait dans les caves des maisons qu’il construisait, rue Fontaine-au-Roi, dans un quartier de Paris alors terriblement désert. Il vivait là, il y dormait, il y mangeait. Ses repas se composaient littéralement de pommes de terres cuites sous la cendre et arrosées d’eau. Le dimanche seulement, comme extra, comme dessert, comme sacrifice au luxe, on les assaisonnait de sel. D’ailleurs point de fausse honte. Il invitait ses amis à le venir visiter dans ses huttes. Il ne doutait de rien, « Venez dîner, » leur disait-il. Au fond, son cœur s’ulcérait. Le premier germe de cette misanthropie farouche qu’il allait, moins par mode que par nature, pousser jusqu’à la lycanthropie, date assurément de ces heures-là. Pétrus était ambitieux. Point d’envie, nulle passion basse, mais le désir immense de prendre sa place et de la conquérir, une place assez large pour sa nature superbe. Pour cela il faut du temps. Attendre ! Mais c’est le sup-