— N’en dites pas davantage. Quand partons-nous ? Il lallut trois mois pour préparer ce départ.
Entre temps la révolution commençait en Russie. Les journaux étaient pleins des pires nouvelles. Celles qui venaient du sud nous intéressaient particulièrement. On annonçait à Odessa la grève générale ; Odessa était une de nos étapes. A Sébastopol, des emeutes éclataient dans les arsenaux ; nous devions toucher à Sébastopol. Au Caucase. ce n’étaient que brigandages sur les routes, massacres dans les villes, pillage et assassinat partout, l’état de slè S e dans chaque gouvernement, l’anarchie régnant à Batoum, et les Paysans de Gori révoltés proclamaient la République. Nous ne pouvions éviter de traverser le Caucase pour nous rendre en Perse.
Chaque jour les journaux donnaient deux colonnes de dépêches lugubres sur les choses russes. Il suffisait que nous missions une ville sur notre itinéraire pour qu’il lui arrivât malheur. Ainsi de A peine avions-nous décidé de visiter Yalta, qu’elle était pillée...
Aussi les gens sages hochaient la tête, et lorsqu’ils apprenaient que nous emmenions deux jeunes femmes avec nous, ils nous traitaient
de fous.
Pourtant rien ne nous retint. Aux premiers jours d’avril, nous
étions tous à Bucarest. Et c’est là que je vais vous présenter nos com¬
pagnons de route : le prince Georges V. Bibesco, sportsman émérite
et fils d’un Bîbesco doublement français, par les deux guerres auxquelles il prit part, celle du Mexique, celle de 1870 ; sa très jeune femme qui eut toujours avec elle, — où les trouvait-elle dans le
désert ? — des fleurs, et qui autant que les fleurs aime les vers, jus-