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leur son. La rime sera élue en conséquence, non pour le plaisir d’une difficulté vaincue et d’une richesse inutile. Et le rythme du vers, au lieu de prétendre, pour tout mérite, à une symétrique ordonnance, voudra répondre aux mouvements qu’il s’agit de communiquer ; étant expressif, il ne sera plus régulier, ou du moins ne le sera qu’en de certains cas. La cause du symbolisme est liée à celle du vers libre. Elles ont triomphé l’une et l’autre ; non qu’il faille s’en tenir là : ce serait dire que la poésie est terminée. Mais quelques destinées qui lui soient réservées encore, il ne sera plus possible de revenir ni à l’abstraction des classiques, ni aux révoltes des romantiques : la poésie est devenue douce envers les sens ; elle ne les traite plus en ennemis, ni comme des tentateurs. Elle les interroge avec sollicitude sur le secret des existences. C’est une confiance qui ne leur sera pas retirée.

Pareillement la peinture a renoncé à l’abstraction des objets isolés. Elle s’est aperçue que la nature ne lui fournissait pas des arbres tout faits, ni des personnages, mais seulement des vibrations lumineuses, qu’il appartenait à l’esprit de ranger ensuite selon ses lois et ses coutumes. Au lieu d’anticiper sur de tels jugements et d’indiquer à l’avance les règles de cette classification, il lui a paru meilleur de donner la