Page:Claudel - La Messe là-bas, 1919.djvu/60

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Avant que tu le saches, j’étais là, et je demeure avec cet homme que j’ai fait.

Tu cesserais d’exister si je me retirais.

Viens avec moi, où Je Suis, en toi-même, et je te donnerai les clefs de l’existence.

Là où Je Suis, c’est là éternellement qu’est le secret de ta naissance.

C’est en vain que tu te débats, tu ne te défendras pas éternellement contre ma paix.

Le sens-tu ou non, que je suis là, ce convive que tu attendais ?

Mon repos est-il assez profond pour toi ? que dit-il, ce pauvre cœur ?

La crêche est profonde qui s’ouvre à tous les agneaux du Seigneur.

Si nous n’étions différents, il n’y aurait pas ce désir, il n’y aurait pas ce besoin, il n’y aurait pas cette grande étreinte comme entre les époux !

Si tu n’étais pas mon fils, je ne serais pas aujourd’hui ce Père à qui l’Enfant Prodigue jette les bras autour du cou.

Depuis qu’enfin nous nous sommes atteints dans cette abdication et dans cet effort,

Depuis que le temps que nous sommes unis, qu’est-ce que nous avons fait de la mort ?

Pour ne pas me préférer, il aurait fallu ne pas me connaître.