Page:Claudel - Le Pain dur, 1918.djvu/130

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Cette grande maison ravagée, dépossédée de ses maîtres, morte... Ce mur nu, ce Christ déposé, attendant que quelqu’un l’enlève, et tout cela pendant si longtemps qui fut toute la joie et toute l’espérance de l’humanité, Maintenant descendu et déposé contre le mur. On l’a oublié là. Et à la place de Jésus-Christ cette idole hideuse et luisante, ce vieillard colorié qui n’est que joues et toupet ! Que je suis seule ici ! Grand Dieu, que je suis seule ici et que je m’y sens étrangère ! Tout, autour de moi, m’est hostile et je n’y ai aucune place. Les choses mêmes autour de moi, on dirait qu’elles ne me voient pas et que je n’y suis pas.
LOUIS — Viens avec moi. Rentre avec moi dans la vie et dans la réalité.
LUMÎR — La réalité est absente. La vraie vie est absente. Moi, du moins, je suis éveillée pour ce court moment.