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Page:Claudel - Le Pain dur, 1918.djvu/137

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Une rupture, une lassitude, un vide qui ne peut plus être comblé. Tu n’es plus le même qu’aucun autre. Tu es seul. A jamais tu ne peux plus cesser d’avoir fait ce que tu as fait, (doucement) parricide ! Nous sommes seuls tous les deux dans cet horrible désert. Deux âmes humaines dans le néant qui sont capables de se donner l’une à l’autre. Et en une seule seconde, pareille à la détonation de tout le temps qui s’anéantit, de remplacer toutes choses l’un par l’autre ! N’est-ce pas qu’il est bon d’être sans aucune perspective ? Ah, si la vie était longue. Cela vaudrait la peine d’être heureux. Mais elle est courte et il y a moyen de la rendre plus courte encore. Si courte que l’éternité y tienne !
LOUIS — Je n’ai que faire de l’éternité.
LUMÎR — Si courte que l’éternité y tienne ! Si courte que ce monde y tienne dont nous ne voulons pas et ce bonheur dont les gens font tant d’affaires !