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claudine à l’école

(petite rosse d’Aimée !) excite l’admiration de trois commis-voyageurs qui fument des cigares, et qui, amusés de ce départ d’un pensionnat, viennent dans la salle d’attente faire briller pour nous leurs bagues et leurs blagues, car ils trouvent charmant de lâcher d’énormes inconvenances. Je pousse le coude de Marie Belhomme pour l’avertir d’écouter ; elle tend ses oreilles et ne comprend pas ; je ne peux pourtant pas lui dessiner des figures à l’appui ! La grande Anaïs comprend bien, elle, et se fatigue en attitudes gracieuses, avec d’inutiles efforts pour rougir.

Le train souffle, siffle ; nous empoignons nos valises, et nous nous engouffrons dans un wagon de seconde, surchauffé, suffocant ; heureusement le voyage ne dure que trois heures ! Je me suis installée dans un coin pour respirer un peu, et tout le long du chemin nous ne causons guère, amusées de regarder filer les paysages. La petite Luce, nichée à côté de moi, passe tendrement son bras sous le mien, mais je me dégage : « Laisse, il fait trop chaud. » J’ai pourtant une robe de tussor écru, toute droite, froncée comme celle des bébés, serrée à la taille par une ceinture de cuir plus large que la main, et ouverte en carré ; Anaïs ravivée par une robe de toile rouge, paraît à son avantage, de même que Marie Belhomme, en demi deuil, toile mauve à bouquets noirs ; Luce Lanthenay conserve son uniforme noir, chapeau noir, à nœud rouge. Les deux Jaubert continuent à ne