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Page:Clausewitz - Théorie de la grande guerre, I.djvu/137

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le combat.

tions. Ce sont là des situations que nous retrouverons quand nous procéderons à la recherche du but particulier que le combat peut avoir ; mais, pour le moment, nous nous contentons d’appeler l’attention sur ce que, dans la majorité des cas, le retrait des troupes du champ de bataille est considéré comme un aveu d’infériorité et un abandon du plan poursuivi, et que, par suite, l’impression morale que ce fait exerce sur l’armée et en dehors de l’armée est loin d’être négligeable.

Dans certaines entreprises très judicieusement basées sur les circonstances, cette fausse appréciation de l’opinion publique peut créer des difficultés d’un caractère tout à fait spécial aux généraux en chef et aux armées qui n’ont pas encore de renommée toute faite. C’est ainsi, par exemple, qu’en exécution d’une action générale, le plan d’une grande opération peut reposer sur une série de combats se terminant tous par un mouvement de retraite, et que ceux-ci peuvent revêtir, aux yeux du public, la fausse et très préjudiciable apparence d’une série de défaites.

Bien que la conservation du champ de bataille n’implique pas nécessairement l’idée de la victoire, il est certain cependant que là où il y a à la fois victoire et conservation du champ de bataille, la victoire n’en est que plus incontestable. C’est ainsi qu’à Soor, les trophées remportés sur l’ennemi ne consistant qu’en 20 canons et quelques milliers de prisonniers, le grand Frédéric, quoiqu’il eût déjà résolu et regardât comme nécessaire de se retirer en Silésie, n’en resta pas moins cinq jours durant sur le terrain même de la lutte afin de mieux affirmer sa victoire. Il croyait, il le dit lui-même, se rapprocher de la paix par l’effet moral ainsi produit, et bien que pour arriver à ce résultat il lui ait encore fallu vaincre à Katholisch-Hennersdorf, dans la Lusace, et à Kesselsdorf, on ne saurait nier cepen-