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chap. xi. — emploi de la bataille.

par conséquent le centre vers lequel doivent converger tous les projets et tous les calculs du plan de campagne. Plus un général en chef est animé du véritable esprit de la guerre, plus il a conscience qu’il peut et doit vaincre son adversaire, et plus ardemment il recherche une première grande bataille et compte tout atteindre par elle. Bonaparte ne s’est peut-être jamais mis en campagne sans avoir la conviction d’écraser son adversaire dans la première rencontre, et Frédéric le Grand, bien que dans une sphère d’actions et d’intérêts plus restreinte, obéissait sans doute à la même pensée, alors que ne disposant que d’une faible armée, il cherchait à se dérober sur ses derrières, de façon à profiter des lignes intérieures pour tomber à l’improviste tantôt sur les Russes et tantôt sur les Impériaux.

Nous avons déjà dit que dans une bataille générale la grandeur de la décision dépendait en partie de la quantité des forces avec lesquelles la bataille était livrée. Or comme plus la décision ainsi obtenue est considérable et plus elle entraîne de décisions subordonnées, les généraux qui par confiance en eux-mêmes ont recherché les batailles décisives, ont toujours pu y consacrer la plus grande partie de leurs forces sans rien compromettre d’important sur les autres points.

Quant aux dimensions ou, pour parler plus justement, quant à la force intrinsèque de la victoire, elle dépend principalement :

1o De la forme tactique dans laquelle la bataille a été livrée ;

2o De la nature de la contrée ;

3o De la proportion des armes ;

4o Du rapport des forces.

En attaquant l’ennemi de front sans le menacer sur ses flancs, on arrive rarement à d’aussi grands résul-