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chap. xiv. — de l’alimentation des troupes.

hommes dans une localité pour y requérir des vivres, n’a ni le temps ni les moyens de rechercher tous les approvisionnements ; les éléments de transport lui manquent en outre, et il ne peut emporter qu’une faible partie des ressources existantes.

D’ailleurs lorsque de grandes masses de troupes sont ainsi campées, cela produit une agglomération si disproportionnée par rapport à la partie de la contrée qui par sa proximité est seule à même de subvenir à ce système de réquisitions expéditives, que cet approvisionnement restreint devient bientôt insuffisant.

Comment peut-on imaginer, en effet, qu’un corps de 30 000 hommes campé dans un cercle d’un mille (7 500 mètres) de rayon, soit en mesure de trouver sa subsistance journalière sur une surface de territoire de 3 à 4 milles carrés (environ 200 kilomètres carrés), en admettant même que d’autres troupes ne soient pas déjà réparties en cantonnements sur cette surface, et ne s’opposent dès lors elles-mêmes à laisser enlever si peu que ce soit des localités qu’elles occupent ?

Enfin cette manière de procéder est celle qui entraîne le plus de gaspillage. Il est rare que livrés à eux-mêmes, les hommes ne s’adjugent pas plus qu’il ne leur est raisonnablement nécessaire, de sorte qu’une bonne partie des ressources se perd ainsi sans profiter à personne.

On doit conclure de là qu’on ne peut tirer un bon parti de ce mode d’approvisionnement que s’il s’agit de troupes peu considérables, par exemple d’une division de 8 000 à 10 000 hommes au maximum, et que dans ce cas même on ne doit y avoir recours que comme à un mal nécessaire.

Les subdivisions de troupe qui se trouvent directement en présence de l’ennemi, telles que les avant-

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