Page:Clausewitz - Théorie de la grande guerre, I.djvu/371

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
360
les forces armées.

nière de procéder. Il est certain, en effet, qu’aucun autre système ne produit d’aussi grands résultats et ne se prête dans la même mesure à l’énergie de la direction ainsi qu’à l’indépendance et à la mobilité des mouvements. Grâce à la facilité avec laquelle on assure ainsi le service des vivres, on n’a aucune difficulté à redouter pour la subsistance des troupes pendant les trois ou quatre premières semaines du début d’une campagne, d’où il résulte que l’on a tout le temps de voir quelle sera la direction que l’on aura à prendre, et par conséquent de choisir l’emplacement des magasins auxquels on recourra plus tard et de les approvisionner d’avance. Les armées ont donc vraiment gagné une liberté parfaite à l’application de ce système. Il va sans dire, néanmoins, qu’une direction présentera parfois plus d’avantages qu’une autre au point de vue même de ce mode d’approvisionnement, et que par suite le choix à faire en sera par le fait quelque peu influencé, mais du moins la question de la subsistance de l’armée ne s’imposera plus comme autrefois d’une façon impérieuse et décisive dans l’exécution du plan général, et l’on ne se heurtera plus désormais à des difficultés insurmontables.

Il se présente cependant une situation dans laquelle le mode d’alimentation basé sur les réquisitions perd toute sa valeur. C’est celle dans laquelle se trouve une armée qui effectue sa retraite en pays ennemi. Aussitôt, en effet, se réunissent les conditions les plus défavorables à ce système. Tout d’abord le mouvement est généralement continu ou ne présente, du moins, que des temps d’arrêt trop peu considérables pour que l’on puisse en profiter et réunir les réquisitions demandées ; puis les circonstances dans lesquelles une retraite se produit sont habituellement si critiques que l’armée ne peut plus désormais agir qu’en ordre très concentré, et