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de la stratégie en général.

Toutes ces considérations n’ont trait qu’à l’action successive des forces, et nullement à la notion même d’une réserve stratégique. Ce sont là, il est vrai, deux idées qui ont de nombreux points de contact, mais dont la seconde se rattache, en outre, à une série de considérations qui lui sont spéciales, et que nous exposerons dans le chapitre prochain.

Nous avons cherché à prouver ici qu’alors que la durée seule de leur emploi constitue déjà une cause d’affaiblissement pour les forces dans le combat, et que par conséquent, le temps est, dans la tactique l’un des facteurs du produit, ce n’est pas essentiellement le cas dans la stratégie. Dans la stratégie, en effet, l’action destructive que le temps exerce sur les forces tient en partie à d’autres causes et se trouve en partie aussi diminuée par la grandeur même des forces employées, de sorte que, au contraire de ce qui a lieu dans la tactique, on ne saurait se faire un auxiliaire du temps intrinsèquement considéré, en ne portant que successivement les forces à l’action stratégique.

Nous disons : du temps intrinsèquement considéré, car, en raison des circonstances extrinsèques qu’il peut et doit même nécessairement amener en faveur de l’un ou l’autre des adversaires, le temps exerce sur l’action stratégique une influence tout autre, dont la valeur est si loin d’être indifférente, que nous nous réservons d’en faire l’objet de considérations ultérieures spéciales.

La loi que nous avons cherché à développer est donc que de la totalité des forces destinées à amener un choc stratégique, il faut, simultanément et sans exception, employer à ce choc toutes celles qui ne sont pas indisponibles au moment où il se produit, et que cet emploi approchera d’autant plus de la perfection, que le choc se concentrera davantage en un acte et en un moment.

Il existe cependant aussi une action soutenue des