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Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/112

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L’excès de la jouiſſance ayant à la fin calmé nos tranſports, nous nous mîmes à parler d’affaires. Charles m’avoua naïvement qu’il étoit né d’un pere indigent, de qui il n’avoit eu qu’une bien médiocre éducation. Le pauvre enfant étoit parvenu juſqu’à l’âge de raiſon dans une ſi parfaite indolence, qu’il n’avoit jamais eu la penſée de prendre aucun parti. Sa grand’mere, du côté maternel, l’entretenoit dans cette vie oiſive, par une complaiſance aveugle pour ſes fantaiſies. La bonne femme jouiſſant d’un revenu aſſez conſidérable en viager, fourniſſoit amplement à ſes beſoins ; moyennant quoi il ſe trouvoit en état de ſupporter les dépenſes d’une maîtreſſe. Le pere, qui avoit des paſſions que la médiocrité de ſa fortune l’empêchoit de ſatisfaire, étoit ſi jaloux du bien que cette tendre parente faiſoit à ſon fils, qu’il réſolut de s’en venger, & n’y réuſſit que trop, comme tu le verras bientôt.

Cependant Charles, qui vouloit ſérieu-