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Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/128

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neurs de cette premiere entrevue, lui préſenta une chaiſe, & en prit une pour elle-même ; cependant pas un mot ni de part, ni d’autre. Un regard ſtupide & effaré étoit l’interprête de la ſurpriſe où m’avoit jetté cette étrange viſite. Ma digne hôteſſe enfin, ne voulant pas perdre ſon tems, rompit le ſilence. “ Allons, Mademoiſelle Fanny, (dit-elle, dans un ſtile auſſi rude que familier & d’un ton d’autorité,) levez la tête, mon enfant, ne laiſſez point détruire un ſi joli minois par le chagrin. Au bout du compte le chagrin ne doit pas être éternel ; allons, un peu de gaieté. Voici un honnête Monſieur qui a entendu parler de vos malheurs, & veut vous faire plaiſir. Croyez-moi, ne refuſez pas ſa connoiſſance, & ſans vous piquer d’une délicateſſe hors de ſaiſon, faites un bon marché tandis que vous le pouvez ”.

Mon inconnu, qui vit aiſément qu’une auſſi impertinente harangue étoit moins