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Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/130

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Quoiqu’il en ſoit, la ſituation attendriſſante où il me vit, le frappa juſques au fond du cœur. Il tira précipitamment ſa bourſe, & paya, ſans différer, tout ce que je devois à Madame Jones. Il en prit une quittance en bonne forme, qu’il me força de garder. Cette infâme racoleuſe n’eut pas plutôt touché ſon argent, qu’elle nous laiſſa ſeuls.

Cependant le Cavalier, qui n’étoit rien moins que neuf dans de pareilles affaires, s’approcha d’un air officieux, & du coin de mon mouchoir m’eſſuya les pleurs qui me baignoient le viſage ; après quoi il s’aventura de me donner un baiſer. Je n’eus pas le courage de faire la moindre réſiſtance, me regardant dès lors comme une marchandiſe qui lui étoit dévolue par le débourſé qu’il venoit de faire. Inſenſiblement il me mania la gorge. Enfin, me trouvant docile au-delà de ſes eſpérances, il fit de moi tout ce qu’il voulut. Quand il eut aſſouvi ſa bru-