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Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/150

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Quand je crus l’avoir aſſez bien préparé, un jour qu’il vint, à ſon ordinaire, je lui dis de fermer la porte en-dedans. J’étois alors couchée ſur le théâtre des plaiſirs de Monſieur H.... & de ma ſervante, dans un déshabillé fait pour inſpirer des tentations à un Anachorète. Je l’appellai, & le tirant près de moi par ſa manche, je lui donnai pour le raſſurer deux ou trois petits coups ſous le menton, & lui demandai s’il avoit peur des Dames ? en même tems je me ſaiſis d’une de ſes mains, que je ſerrai contre ma gorge, qui treſſailloit & s’élevoit comme ſi elle eût recherché ſes attouchemens. Bientôt tous les feux de la nature étincellerent dans ſes yeux ; ſes joues s’enluminerent du plus beau vermillon. La joie, le raviſſement & la pudeur le rendirent muet ; mais la vivacité de ſes regards, ſon émotion, parlerent aſſez pour m’apprendre que je n’avois pas perdu mon étalage.