Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/47

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propos. Le marché fut à peine conclu, qu’il prétendit qu’on lui livrât la marchandiſe ſur le champ. On eut beau lui repréſenter que je n’étois pas encore préparée à une pareille attaque ; qu’il falloit tâcher de m’apprivoiſer avant de bruſquer les choſes ; que timide & jeune comme je l’étois, on riſqueroit de m’effaroucher & de me rebuter par trop de précipitation. Diſcours inutiles : tout ce qu’on put obtenir de lui, fut qu’il patienteroit juſqu’au ſoir.

Pendant le dîner mes deux embaucheuſes ne ceſſerent d’exalter le merveilleux couſin, & me dirent “ que j’avois eu le bonheur de le rendre ſenſible dès la premiere vue… qu’il me feroit ma fortune ſi je voulois être bonne fille, & ne point écouter mon caprice… que je pouvois compter ſur ſon honneur… que je ſerois au niveau des plus grandes dames du Royaume „. Elles ajouteront à ces faſtidieux propos