Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/14

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et des chefs qui les appliquaient. On y buvait et fumait, on y échangeait, on y vendait ce qui avait été escamoté pendant la journée.

Non loin de cette taverne était un autre cabaret à eau-de-vie. Sur la grande table, on lisait l’inscription que voici :

Here you may get drunk for a penny, dead drunk for two pence, and get straw for nothing.

(Ici on peut se saouler pour un penny, tomber ivre-mort pour deux pence et avoir de la paille par-dessus le marché.)

En effet, ceux qui tombaient ivres-morts étaient descendus dans les caves, où on les étendait sur de la paille.

Une société mêlée fréquentait encore le Lion Blanc, une des dernières des cent tavernes de Drury, si célèbres sous Charles II. La police voulut une fois intervenir dans une orgie qui s’y faisait et l’on trouva, mêlées à des filles de la plus basse catégorie, des dames de qualité qui furent laissées en liberté, tandis que les autres étaient menées en prison.

À la Cave au Cidre, près de Maiden Lane, on rencontrait de jolies femmes et des gens d’esprit, des écrivains, des acteurs.

La Rose Tavern, dans Russel Street, n’était fréquentée que par les membres de l’aristocratie. Ils venaient s’y enivrer en soupant avec des femmes.

Mais l’établissement le plus élégant et le plus cher était celui à la Tête de Shakespeare et les courtisanes tenaient à honneur de figurer sur la liste que Jack Harris, le gérant, tenait à la disposition des gentlemen, ses clients.

C’est dans une de ces tavernes aristocratiques que je ne sais plus quel écervelé, s’étant enivré, rencontra une fille