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Page:Clemenceau-Demosthene-1926.djvu/106

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DÉMOSTHÈNE

même l’inexpiable défaillance en allant au-devant de Démosthène qui lui fit la grâce d’oublier.

Faute de pouvoir payer l’énorme amende, c’était la prison perpétuelle. Triomphe trop complet du parti macédonien. Dans le succès des mauvais sentiments, il y a souvent de vieux vestiges de pudeur dont les bourreaux du jour ne peuvent se détacher. On n’osa pas incarcérer Démosthène. Il prit le chemin de l’exil, gardant, sans doute, pour ceux qui restaient au pied de l’Acropole, une silencieuse pitié. D’Égine, de Trézène, il pouvait voir les côtes de l’Attique. Dans quel tumulte de pensées ? On lui a attribué des paroles de découragement. Rien de moins probable, puisqu’à la mort d’Alexandre il reprit le harnais du même cœur qu’auparavant.

Pourquoi, après la plus belle vie, Démosthène se serait-il vendu pour tenir à prix d’or une conduite que tout le peuple d’Athènes s’imposa gratuitement ? Il y a des âmes inférieures où la bonne foi » est d’une complexité si confuse qu’on n’en peut débrouiller l’écheveau. Les victoires macédoniennes ne suffirent que trop souvent, dans Athènes, à déterminer des convictions ». L’histoire, moins accommodante, conserve ses droits de contrôle sur les hommes et les événements. Plutarque, trop prompt à rapporter les accusations des sycophantes, reconnaît que Démos-