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DÉMOSTHÈNE

transition, de l’héroïsme sublime à des chutes où sombraient les plus beaux élans de virilité. La vie de l’Orient, incomparable dans les champs de la pensée, se prêtait à toutes les violences de la guerre, par incompréhension de l’action coordonnée.

Héritier de ces dons, l’Hellène, au contact des « barbares », trouvait la guerre plus facile que la paix, et ne jouissait vraiment de ses relâches que dans la musique de parler. La moralité n’était pas sans fissures. On était trop subtil pour se payer uniquement des mots où l’imagination se délectait. C’est pourquoi toutes les contradictions s’accommodaient d’elles-mêmes, sans que personne prît la peine d’y penser. Aristophane bafouait impunément les Dieux sur la scène, et Socrate payait de la ciguë le crime de les avoir oubliés.

A certaines heures, de ces chaudières d’idéal et de basses turbulences où toutes les sorcières avaient apporté leurs magies, un homme surgissait pour manifester des énergies au-dessus de son temps, parfois au-dessus de lui-même, et marquer sa ville d’une empreinte de son passage. Dans les luttes sans fin pour l’hégémonie, Thèbes se reconnaissait dans Epaminondas, Sparte dans Lysandre, Athènes dans Périclès. Pour l’Hellade elle-même, à l’heure tragique où ses suprêmes