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Page:Clemenceau-Demosthene-1926.djvu/81

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DÉMOSTHÈNE

allait se jeter sur les Perses (car, en ce temps-là, notre Gaule était dédaignée), quand il fut assassiné dans une fête de pompe asiatique où il faisait porter sa statue d’or devant lui. Alexandre était là pour reprendre l’entreprise et l’accroître. Il n’y manquera pas. Maîtresse de ses destinées, jamais la Grèce ne se fût lancée dans l’Inde où rien ne l’appelait. Les Gaules l’attendaient, d’esprit mieux préparé pour les développements d’énergie mentale dont l’Hellade se trouvait l’initiatrice supérieure. L’hellénisation directe nous aurait certainement fourni des constructions d’entendement fort différentes de celles qui sont venues de l’hétérogénie gréco-romaine pour aboutir au double effondrement de Rome et de Byzance, jusqu’à ce que la Renaissance eût renoué les grands chaînons de la culture humaine. C’est ce qui nous donne le droit de dire qu’avec le triomphe de Démosthène le sort du monde était changé, puisque la civilisation suivait un autre cours.

Mais le sort implacable est désormais fixé. Par les soins d’Alexandre, Thèbes est déjà rasée. Thèbes s’est révoltée pendant qu’il ravageait la Thrace, et les Athéniens, ô honte suprême ! ont renié l’alliance que Démosthène leur avait gagnée. De ses propres deniers, Démosthène, invaincu, vient au secours de Thèbes. Vainement. La fortune ne se lasse pas de le trahir. Il ne se lasse pas de résister.