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Page:Clemenceau-Demosthene-1926.djvu/92

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DÉMOSTHÈNE

faiblesses peut l’emporter, à certaines heures, sur l’héroïsme désintéressé d’un grand cœur cherchant à faire une force synthétique de toutes hésitations de volontés. Où se prendre ? Pour des temps dont on n’entrevoit pas la fin, le faible ne cessera d’ajourner l’action au lendemain, en réponse aux exigences du fort, même si le fort, au lieu de sa domination, cherche à lui imposer l’effort de libération. C’est la question qui se débat dans le discours pour la Couronne. C’est le litige éternel des hommes à tous moments mis en demeure par les événements de la vie de se prononcer sur eux-mêmes et de déterminer ainsi l’avenir de ceux dont ils engagent la destinée.

Cet aspect historique est d’une saisissante lumière dans le procès pour la Couronne, où nous figurons comme héritiers des bonnes et des mauvaises chances dont la somme chargera le sort de la postérité. A l’heure du corps à corps d’Eschine et de Démosthène, qui nous tient encore haletants par la grandeur des personnages aussi bien que de la cause en débat, nous ne pouvons que nous laisser reprendre par l’angoisse des anciens jours, quand la décision se voit remise aux défaillances d’une cohue d’arbitrage inconsciente des suites de l’arrêt qu’elle va prononcer. Eschine, porte-voix de Philippe, attend tout des faiblesses d’Athènes qu’il appelle en s’appliquant à les déguiser. Démos-