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notre planète

s’offre à toutes nos enquêtes, et nous livre, sans trop marchander, des séquences de rapports qu’il nous échoit d’ajuster aux lois générales de l’univers ultra-solaire.

Les mouvements de l’écorce solidifiée, plus mince qu’une coquille d’œuf au regard de la masse, sont reconnus avec de suffisantes précisions. De même les distributions des continents et des mers, en leurs successions primitives dont nous avons l’aboutissement sous les yeux. Cavendish, avec sa « balance à peser le monde », a pu déterminer la densité du globe par une simple expérience de laboratoire. Le noyau, plus ou moins ferrugineux, de fusion centrale, entouré d’une couche sphérique d’une densité moindre, nous révèle une écorce qui ne doit pas dépasser 70 kilomètres d’épaisseur, avec une température des couches profondes qui atteint peut-être plusieurs milliers de degrés[1]. Quant aux mouvements du magma général et de l’écorce elle-même, sous l’action de leurs marées lunaires et solaires aussi bien que des phénomènes sismiques, c’est un vaste champ d’expérience qu’il suffit ici de noter.

Ceci, pour une indication des complexités des mouvements de la terre reconnus depuis l’éclat retentissant de Galilée jusqu’aux calculs de la pesanteur. Rotation, translation — cette dernière a une vitesse d’environ 30 kilomètres par seconde[2] — se composent sans épuiser la liste des composantes. Ajoutons-y l’intervention du système lune-terre. L’inclinaison de l’axe terrestre sur l’écliptique déterminera nos saisons comme l’inégalité de nos révolutions diurnes et nocturnes. La révolution dite de la « précession des équinoxes », sous l’influence de l’attraction luni-solaire, s’accomplit en 26 000 ans. Et voici que le pôle lui-même de la terre se déplace — l’axe du globe subissant des oscillations dont les causes sont déterminées. Qu’on me pardonne ces hâtives notations par lesquelles je cherche à fixer des repères de visions qui, proprement ajustés, pourraient nous faire apparaître, comme à la lueur d’un coup de foudre, l’affolante ruée des tourbillons

  1. On a calculé que depuis la formation de l’écorce solide de notre globe, il s’est écoulé de 1 000 à 2 000 millions d’années. Du jour où notre planète est devenue astre détaché de la nébuleuse solaire, il faut compter, nous dit-on, un trillion d’années.
  2. Nos poudres les plus puissantes ne communiquent pas aux projectiles une vitesse supérieure à un kilomètre par seconde.