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au soir de la pensée

de l’univers, au tableau d’une synthèse torrentielle de nos sensations, où nous cherchons la fixité.

Pourrions-nous négliger, enfin, le mouvement de translation générale qui entraîne tout le système solaire à travers l’espace intersidéral dans la direction de Véga ? La vitesse en est environ de 20 kilomètres à la seconde, et « l’ellipse terrestre se voit ainsi transformée en une immense spirale elliptique, une vis gigantesque dont le grand diamètre serait le grand axe de l’orbite terrestre, c’est-à-dire plus de 207 millions de kilomètres. Quant au pas de cette vis que la terre parcourt pendant un an, il est de plus de 627 millions de kilomètres. C’est la quantité dont se déplace le soleil au cours d’une année »[1].

En somme, la terre, dans son ensemble, se trouve animée de onze mouvements reconnus, qui se composent pour des effets déterminés. Encore, y faut-il ajouter les marées océaniques et les marées terrestres de l’écorce, pour un surcroît de complexité. Ce sont les fondements déterminés de cette « stabilité » antigaliléenne sur la constatation de laquelle l’Église a joué ouvertement le plein de son autorité. Et le beau, c’est qu’ayant perdu Ia partie, elle ne s’en attribue pas moins une puissance éternelle « d’infaillibilité » qu’elle oppose à la « faillite » de notre positivité.

En fait, nos premières observations d’empirisme nous ont conduits fort au delà de ce que nos plus grands astronomes avaient pu supposer. De nos jours, nous ne pouvons même pas inférer que le grand pas de vis du soleil soit le terme ultime des réactions interastrales au delà desquelles il n’y aurait plus qu’à recommencer. Comment même concevoir, où qu’elle se puisse rencontrer dans l’infini, une limite de réactions interastrales à s’entre-ajuster. La seule indication en évoque une anxiété au plus profond de nous-mêmes. C’est une des qualités de nos compréhensions relatives, de constater que notre connaissance n’entame pas au delà d’une superficielle vision d’activités.

L’atome, il est vrai, semble nous promettre au delà, avec les transformations d’énergie qui nous mènent au seuil d’une conception d’unité cosmique défigurée par la métaphysique entitaire et les divinisations de la théologie. C’est un grand pas sans doute. Mais à quel mètre en déterminer l’amplitude ? Nous cherchons

  1. A. Berget, La Vie et la mort du globe.