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AU SOIR DE LA PENSÉE

donné, sans doute, beaucoup de mal pour nous convaincre que nos sensations nous égarent. Cette défaillance originelle se rencontre souvent, en effet. Mais ne pouvons-nous faire choix entre les fictions révélées qui prétendent se soustraire à tout contrôle et des fautes d’observation que nous sommes en état de rectifier ? L’expérience peut fournir ses moyens de contrôle. La Divinité, jusqu’à ce jour, n’a pu en faire autant. Elle nous apporte, annonce-t-elle, une connaissance totale, mais sous la condition de ne pas la mettre à l’épreuve. N’était le secours des émotivités obtuses, le compte des théologies aurait été bientôt réglé.

Nous sommes ce que nous sommes, et c’est fort au delà de ce qu’aurait permis de croire l’obscure humilité des successions de phénomènes d’où nous avons jailli. Ballottés de l’inconnu à l’imaginaire et de l’imaginaire au connu, nous pouvons jeter l’ancre aux premiers rocs de la connaissance positive pour affronter, de là, les fortunes de notre destinée.

Étincelle des choses dans des ouragans d’obscurité, notre valeur est d’un renforcement de conscience ou le monde vient s’objectiver.