sances positives qu’il avait si brillamment inaugurées[1], fier de son Empire du Milieu, nombril de l’univers, et par là tout proche d’une cristallisation dans l’émerveillement de lui-même, on l’a vu, toutefois, pousser l’abnégation de sa pensée jusqu’à l’importation du bouddhisme indien, par l’unique raison que la doctrine lui paraissait plus belle, c’est-à-dire plus satisfaisante pour ses émotivités[2].
Je voudrais pouvoir dire les grands pèlerinages indiens, aux quatrième et sixième siècles de notre ère, des fameux bouddhistes chinois Fa-Hsien et Hiouen-Thsang « à la recherche du Canon du Bouddha ». La belle propagande de saint Paul chez les Gentils n’est, en comparaison, que simple amusement. Au rebours du mobile de l’apôtre chrétien, la mission des deux pèlerins chinois fut, non de répandre leurs propres croyances, mais de les justifier, de les purifier à leur source, en allant recueillir sur place tous témoignages des actes et des paroles authentiques du Bouddha Çakya-Mouni.
Le propos est déjà d’une telle élévation que rien, je crois, ne s’y peut comparer dans l’histoire des manifestations religieuses où l’on ne rencontre pas communément le désir de corriger des textes sacrés avant de se vouer à la prédication. Encore fallut-il que ce sentiment fût poussé jusqu’aux extrêmes élans d’une
- ↑ N’a-t-on pas vu le même peuple qui trouva la boussole se mettre à l’œuvre doctrinalement, un beau matin, pour détruire les chemins de fer ?
- ↑ Si les efforts de notre christianisme sont restés impuissants devant le rationnalisme chinois, avec ou sans Bouddha, comme devant l’Islam, c’est que notre propagande s’offre vraiment à son désavantage. L’habitude que nous avons de nos dogmes nous rend insensibles à des traits, qui choquent vivement les esprits éloignés de notre accoutumance. L’enfantement virginal et la théophagie sont des obstacles décisifs pour beaucoup. Dans l’Inde où la mythologie réalise d’autres tours de force, nos missionnaires ont fait quelques conquêtes parmi les peuples imaginatifs du Sud, mais un entretien de cinq minutes vous aura bientôt renseigné sur la qualité de ces « conversions ».
sacrés. Il y en a partout. Quelques-uns, figés d’indifférence, se perdent dans le décor. D’autres se lovent, ou se coulent parmi les choses, sans s’étonner de notre étonnement. Ils sont venus de Chine, paraît-il, on ne sait comment. Nul souci de la clef des champs. De beaux œufs frais (car le Chinois, seul, préfère l’œuf avancé) dans l’eau d’un vase de bronze, font les délices de leurs repas. Quand ils l’ont vidé à travers la coquille, celle-ci remonte à la surface, et le gardien s’empresse de la remplacer. Une vie de Dieux, vivant de l’offrande, avec une heureuse correspondance d’inactivités. (2)