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l’évolution

s’étaient évanouis dans l’inoonsciente souveraineté des lois cosmiques. L’ingéniosité de Maxwell amène ses « petits démons » au même événement. Il ne s’agit plus que de trouver l’enchaînement des phénomènes positifs qui doit conduire au même résultat. Un cas analogue, observe Arrhénius, se présente tout justement dans les corps célestes à forme gazeuse — soit les nébuleuses — quand les molécules du gaz qui constitue l’atmosphère d’un corps céleste ont une vitesse suffisante (cette vitesse est de 11 kilomètres par seconde pour notre globe), et que se trouvant dans les couches extérieures de ce gaz, elles échappent à sa sphère d’attraction et continuent leur chemin vers l’espace infini. » C’est ainsi qu’une comète échappe au système solaire. C’est probablement ainsi que la lune a perdu son atmosphère. « C’est ainsi que les nébuleuses perdent, par leurs parties périphériques, les molécules animées des plus grandes vitesses, ce qui en refroidit les couches les plus éloignées du centre ». De ce pas, nous irions encore à la mort calorifique. Mais « il existe dans les nébuleuses de nombreux corps immigrés qui ont condensé les gaz autour d’eux et qui ont, par suite, atteint une température supérieure. Des molécules errantes peuvent encore parvenir à l’atmosphère très étendue de ces étoiles à grande croissance, ce qui aura pour effet d’accélérer la condensation, accompagnée d’une constante diminution de l’entropie. C’est par de semblables réactions que le mécanisme de l’univers peut être maintenu en mouvement constant sans jamais s’arrêter. »

L’hypothèse paraît fort acceptable. Qu’elle soit ou non confirmée, elle suffit à nous indiquer quelles sortes d’issues peuvent s’ouvrir à nous pour échapper au non-sens de la mort thermique. L’évolution des nébuleuses nous ouvre à cet égard un champ illimité d’observations. D’une belle vaillance, notre savant s’y engage. Je n’ai point à le suivre dans l’analyse des gaz raréfiés de la nébuleuse, de leurs températures, de leurs formations, de leurs mouvements. Quelques traits seulement pour faire apparaître à leur valeur les changements de conditions des phénomènes : « À supposer que la température absolue de la nébuleuse fût de 50 degrés (-223°), la vapeur du plus volatil de tous les métaux, le mercure, serait, même à l’état saturé, si peu dense qu’un seul gramme en occuperait un cube dont le côté correspondrait à environ 2 000 années-lumière. Cela représente