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au soir de la pensée

pliocénien. Je serais enclin à penser que la preuve est presque trop belle, puisqu’on serait bien embarrassé de nous dire comment le chasseur, armé d’un caillou, peut s’y prendre pour planter son arme à demeure dans l’os de la monstrueuse bête. Donnez une bonne hache bien emmanchée à l’homme de nos jours, et je n’attendrai pas de lui qu’il accoinplisse cet exploit. Je critique, d’ailleurs, l’interprétation, sans être en état d’en proposer une autre que la chute de la bête sur l’instrument. Le coup de la masse animale sur la pierre se comprendrait mieux, en effet, que de la pierre sur le bloc puissamment cuirassé.

En Argentine on a découvert, à plusieurs reprises, des pointes de trait en quartz dans le squelette d’animaux fossiles. Il ne paraît pas qu’il y ait aucune conclusion à en tirer, car l’allégation que ces trouvailles avaient été faites dans le Miocène ne s’est pas trouvée justifiée. Il s’agit manifestement d’animaux quaternaires, du pleistocène, tout au plus.

Si cela ne peut fournir la preuve positive de l’existence humaine dans le terrain tertiaire, les plus autorisés de nos savants n’en concluent pas moins à la probabilité, je dirai même à la nécessité de l’événement. La raison en est des temps incalculables demandés par des séries d’évoluticns qui ne se succèdent qu’à travers des complexités de divergences et de convergences hors de nos déterminations.

Pour l’étude de l’homme quaternaîre, les matériaux historiques sont à pied d’œuvre. En France, un très grand nombre de grottes, probablement des principales, ont été scientifiquement explorées. Les faits acquis sont désormais à la portée de tout le monde. Les photographies, les projections, les monographies interprétatives ont fait entrer, jusque dans le monde de l’ignorance courante, la quantité de propos approximatifs qui donnent accès à toutes les conversations. On a beaucoup appris. Il reste, sans doute, davantage à connaître. Plusieurs s’élancent, d’un pas léger, dans les champs de l’hypothèse où chacun peut librement se donner carrière. Mon rôle est de m’en tenir à quelques interprétations qui, jusqu’ici, n’ont pas été sérieusement contestées[1].

  1. L’homme du tertiaire demeurant inconnu, il est admis, jusqu’ici, que