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notre planète

l’unité de substance et d’énergie sans pouvoir dire que nous l’avons rencontrée dans les fusées de l’électron. Qu’est-ce donc que la substance et l’énergie, qui se distinguent si aisément par le verbe ? Nous ne pouvons jusqu’à ce jour que prendre acte du mouvement et de ses transmissions sans réussir objectivement à les séparer ?

Il arrive, d’ailleurs, que, sans l’aide d’aucun thème préconçu, l’atome nous révèle des correspondances ordonnées des cycles planétaires aux cycles électroniques dont une échelle de compositions ferait les déterminations de l’univers. Il n’est pas encore temps de se risquer dans les détours de cette nouveauté. La tentation n’en est pas moins pressante de chercher une suprême coordination des cycles mondiaux évoluant en un ordre de progressions inconnues. Présentement, nous n’en pouvons rien dire, sinon que, pour la première fois dans l’histoire de l’esprit humain, une vision générale du monde s’offre à l’observation directe en dehors des anticipations d’hypothèses. La suite des recherches dira ce qu’il en faut penser.

La conception générale à laquelle l’observation des phénomènes nous convie, ne nous approche-t-elle pas d’une émotion plus profonde et plus belle que les contes puérils de la théologie ? Notre émotion des choses, fonction des mouvements de la connaissance, achève, en des spasmes de sensibilités épanouies, des successions d’accords de l’homme avec le monde où il est apparu. Il faut bien que la qualité de l’émotion soit à la mesure d’une pénétration plus ou moins juste des rapports. Le rêve pourra susciter, pour un temps, des réactions d’enthousiasme plus vives que les lentes formations de l’ingrate espérance dans les cadres de la positivité. Cependant, les développements de la connaissance accrue ne cesseront de susciter, tout au moins dans l’élite, puissance et beauté de sentiments, le plus noble achèvement de la vie.

Des vues de relativité au cours d’une brève existence, cela ne peut-il suffire ? Que nous importeraient, au fond, le jeu des réactions intersidérales, dans les champs de l’espace et du temps infinis, si nous n’y cherchions des raccords de l’homme et de l’univers ? Comment que l’imagination se soit plu à combler l’abîme, il faudra désormais des fondations d’expérience pour les structures de la connaissance positive sous l’assaut des rêveries qui, parce qu’elles ont précédé l’observation, aspirent à la dépasser. Cependant, les activités du « connaître » ont changé