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Page:Closset - L’Ombre des roses, 1901.djvu/70

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Maintenant je voudrais parler discret mais net :

Gilles, ce n’est pas moi et ce n’est pas un autre. — Je l’aime, voilà tout. Je l’ai fait doux et drôle et je l’aime pour rire et pour ne pas pleurer quand je pense à des choses…


Cela se passa bien. La mer portait le ciel ; le ciel flottait, pâle à miracle et plein de vent — entre eux planait le cerf-volant.

Une brume mouillait très doucement la lune, quand dès la nuit venue, elle fut tout en rond comme une large obole blanche.

— Notre Dame des Horizons, dit Gilles, je vois un navire et puis j’entends une chanson, qui le long de tes cieux chavire et tombe, tombe en ma raison comme une pluie… et tire lire !


La nuit palpait le cœur du pauvre cerf-volant, et, charitable, l’environnait d’immensité comme de longs draps d’ombre tissés pour une mort.

Cependant sous le fil perdu, plus oscillant que lui, Gilles parlait encore, et l’écume noyant son visage blêmi, courbé au bout du môle sur la face des eaux, il y sentit des larmes et se trompa d’abord.

Il murmurait… des mots après des mots, légers comme des bulles de silence :

« La pluie tombe dans la mer.
Tout le ciel fond dans la mer
Sa tristesse douce amère… »

— Gilles tendit les bras au hasard des ténèbres — il leva ses mains faibles et chercha son ami — il aima son Désir,

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